PARIS (MPE-Média) – Président du Directoire de Vallourec, le leader mondial français des solutions tubulaires premium, M. Philippe Crouzet a présenté des résultats très positifs pour son groupe en fin de 2e semestre, en grande partie grâce à l’essor des marchés « pétrole et gaz » et à la stabilité du nucléaire dans plusieurs pays dont la Chine et le Royaume-Uni. Aux Etats-Unis et dans le Golfe du Mexique, le nombre de forages « horizontaux » sécurisés pour le gaz et le pétrole de schiste continue à augmenter avec près de 2.000 appareils en activité. M. Crouzet évoque ici l'histoire du gaz de schiste aux Etats-Unis. Entretien.

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GD : Philippe Crouzet, Pdt du Directoire de Vallourec, Olivier Mallet, Directeur financier (ph CJ MPE-Média)

L’exploitation des gaz et pétrole de schiste ne produit pas les mêmes effets aux Etats-Unis qu’en France, semble-t-il ?

Philippe CROUZET - Aux Etats-Unis, où le nombre de forages d‘exploration et d’exploitation du gaz de schiste approchaient les 2.000 « rigs » à la fin juin 2012, au rythme de plus de 10.000 forages par an, l’inventeur de la fracturation hydraulique, Georges Mitchell fait l’objet d’un véritable culte. Georges Mitchell est né en mai 1919 au Texas. Il a inventé le forage d’exploration et d’exploitation des gaz et pétrole de roche par fracturation hydraulique dans son garage avant de le tester voici près de 60 ans, sans jamais connaître aucun accident, contrairement à ce qui se dit chez nous et à propos de quoi il faut prendre du recul.

 

D’où lui est venue cette idée ?

P.C. - Georges Mitchell eu l’idée d’utiliser la fracturation hydraulique pour finir d’exploiter les poches de pétrole au départ, ce qui a été appliqué au gaz de roche par la suite. M. Mitchell a développé puis exploité industriellement ce procédé. Les américains ont conscience de lui devoir une baisse considérable du prix du gaz et des autres énergies, en-dessous de 2$ par million de British thermal Unit (Mbtu) au lieu de 8 $/Mbtu en Europe, soit quatre fois plus.

 

En quoi consiste ce procédé de fracturation hydraulique ?

P.C. – La technique a déjà une soixantaine d’années. Elle consiste à forer en traversant les nappes phréatiques pour faire passer les tubes ensuite à l’horizontale dans la partie supérieure des poches de gaz ou de pétrole. Le procédé vise à casser la roche en envoyant ensuite de l’eau dans la poche de carburant fossile pour finir d’exploiter les poches. Mitchell a eu l’idée d’aller dans les poches de gaz où se trouvaient les roches mères. Quelques petits producteurs peu précautionneux ont été légers lors de rejets de l’eau utilisée à forte pression pour ébranler la roche, mais cela date du tout début, il y a plus de 60 ans, avant la mise au point de la méthode par Georges Mitchell. Ces quelques accidents avant lui étaient le fait d’industriels incompétents et peu scrupuleux mais cela n’est jamais arrivé depuis.

 

Les Etats nord-américains auraient sanctionné de telles pratiques dans le cas contraire ?

P.C. – Bien sûr! Les Etats américains ont demandé et obtenu dès le départ au siècle dernier plus de transparance des compagnies qui effectuent les forages et depuis, ils savent toujours quels produits les sociétés utilisent, dans quelles proportions, quelle est la nature des adjuvants chimiques nécessaires au passage des tubes. : Il n’y a pas eu un seul accident dû au forage horizontal au cours des dernières décennies aux Etats-Unis, qui ont à présent accès et pour longtemps au gaz moins cher du monde. Tous les forages traversent sans nuisance aucune des nappes phréatiques pour aller chercher le gaz ou le pétrole beaucoup plus loin en dessous. Mais l’idée qu’il puisse y avoir des fuites dans les tubes est une aberration.

 

Qui exploite le gaz de schiste au Etats-Unis ?

P.C. – Tout le monde, à commencer par les plus grandes compagnies comme Exon, on dit Esso chez nous, Chesapeake avec le concours de Total. Exon a investi 40 milliards de dollars sur cette technologie de la fracturation hydraulique en 2009. Au 30 juin 2012, nous avons compté plus de 530 appareils en activité pour le gaz contre 1.421 pour le pétrole, en majorité des forages horizontaux ou déviés. La pratique est en augmentation dans le Golfe du Mexique où nous avons recencé 45 appareils en activité en juin dernier.

 

Que penser de l’interdit gouvernemental en France ?

P.C. – En Europe, le gaz de schiste est déjà exploité en Bulgarie. La Pologne veut explorer. La seule question qui se pose pour la France, c’est d’aller voir ce qu’il y a vraiment comme ressource et ce que cela coûterait de l’exploiter, ce qui était le but des demandes de permis abrogées l’an dernier lors du moratoire.

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Forage de la première billette Vallourec à Yougstown, Ohio, USA (ph SD Vallourec)

Où en est Vallourec aux Etats-Unis en 2012?

Olivier Mallet (Directeur financier) - Nous venons de procéder à la fin juin 2012 à la perforation de la première billette d'acier dans notre nouvelle usine de Yougstown dans l'Ohio, la troisième du groupe aux Etats-unis, où le groupe emploie déjà plus d'un millier de personnes. L'évènement, ce sera la sortie du premier tube laminé fini à l'automne 2012. Nous utilisons des machines de technologie FQM aux Etats-Unis et PQF au Brésil, pour produire des tubes premium d'un prix de vente supérieur à 2.000 dollars la tonne contre près de 1.200 dollars la tonne pour des tubes sans soudure normaux. Nous ciblons l'exploitation des shale gas, les gaz de schiste évoqués plus haut. 

Quelle quantité de tubes premium comptez-vous produire à Yougstown en 2013-2014?

P.C. - L'usine de Yougstown sera prête en principe pour lancer la phase à chaud en fin de premier trimestre 2013 à un rythme moyen, à demie-charge, après une première période de démarrage et d'essais qui doit durer au moins jusqu'à la fin 2012, à raison de 15 à 20.000 tonnes de tubes au plus. Ensuite, nous monterons en charge d'ici 2014-2015 jusqu'à près de 350.000 tonnes l'an à terme.

Propos recueillis par Christophe Journet

A voir aussi :

www.vallourec.com

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Mis à jour (Mercredi, 26 Octobre 2016 13:15)