PARIS/WASHINGTON (MPE-Média) - La production totale de pétrole des Etats-Unis d’Amérique a atteint le seuil des 15,9 millions de barrils/jour (Mbepj) le mois dernier, soit près de 2 Mbepj de plus qu’en 2017 au même mois, annonce Bank of America Merril Lynch dans une analyse titrée « October 2018 = US Energy Independance ». Explications.

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Les prévisions de prix des commodités, dont le pétrole, de Bank of America Merrill Lynch au 13 novembre 2018(Source BOFA ML)

Les analystes de Bank of America expliquent que cette augmentation plus forte que prévue de la production pétrolière de l’Amérique du nord provenait en particulier du bassin permien américain, des sables bitumineux du Canada et plus récemment, du golfe du Mexique, ce qui les conduit à prévoir une moyenne quotidienne de production de pétrole supérieure à 12 Mbepj en 2019. Le prix du baril a perdu près de 1% de sa valeur peu après cette annonce.

Roger Carvalho, gérant et analyste de SPTEC-CONSEIL nous confirme que « Les US ont atteint leur indépendance énergétique en production nationale mais également avec le fournisseur Canada. Donc l’Amérique du Nord est tranquille pour longtemps. »

Cette augmentation de la production US cumulée à celle des pays de l’OPEP et non OPEP explique en partie la très récente baisse des prix du Brent et du West Texas, qui n’arrange pas les pays producteurs, au point que l’Arabie saoudite vient d’annoncer qu’elle réduirait sa production d’environ 1 million de barils/jour en 2019, et ce dès décembre 2018, estimant que les équilibres de marché risquent d'être rompus, craignant même une nouvelle chute des prix du brut comme celle de 2014. De là à souhaiter réintroduire de nouveaux quotas par région de production il n’y a qu’un pas.

 

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De 3% de son PIB en achat d’énergie à l’iindépendance totale en octobre 2018, l’Amérique renverse les équilibres du marché mondial du pétrole (source BOFA ML)

« Pour ce qui est des quotas, je ne vois pas les US s’incliner devant un quelconque dictat international. Ils sont très réactifs et flexibles quand ils les veulent, leur moment venu. J’en prends pour exemple la conversion des centrales électriques du charbon au gaz. Ils sont passés au gaz en un rien de temps. Dès que leurs intérêts seront en jeu, ils seront plus réactifs que les autres », estime Roger Carvalho (SPTEC-Conseil).

En Iran où les militaires déclarent être prêts à protéger les pétroliers contre d’éventuelles attaques, suite à l’annonce américaine menaçant d’intervenir en mer pour empêcher ceux-ci d’accoster dans ce pays, les barils de brut se vendent toujours à près de 65 dollars/baril, selon nos sources.

 

Les US ont plus à perdre qu’à gagner avec la Chine et l’Inde qu’avec l’Europe

« Pour ce qui est de l’histoire « Iran », les US ont plus à perdre avec la Chine et l’Inde qu’avec l’Europe. Donc, ils ne touchent pas à ces pays et à leur zone d’influence. Et même s’ils essayaient, ils n’y arriveraient pas et ce serait un revers politique majeur. Mais en n’interdisant pas à ces pays de négocier, ils gardent une opinion positive à leur encontre et permettent au Moyen Orient (ex Iran) de vendre à ces pays là. N’oublions pas que la Russie en a encore beaucoup sous le pied pour s’y substituer. Et que les USA ne contrôlent pas ce qui se passe dans la Caspienne et dans les régions proches. L’Iran peut continuer à vendre et à faire du blending avec les russes. Qui va faire des vérifications moléculaires? », interroge le gérant de SPTEC-Conseil.

Les prix de marché du pétrole Brent comme WTI sont repartis en contango après l’annonce de ce nouveau record de production nord-américain, précise Bank of America, qui estime que la vraie question est de savoir comment l’OPEP va intégrer le phénomène du pétrole de roche américain dans la période : « en 2008, les Etats-Unis consacraient 3% de leur produit intérieur brut à acheter de l’énergie à l’étranger (...) qu’on le mesure en équivalent gaz, pétrole ou dollars US, le passage du déficit au surplus d’énergie des Etats-Unis a eu lieu en octobre dernier. Avec les prix chutant de près de 20% des plus hauts récents à ceux de cette semaine, la prochaine réunion de l’OPEP devra intégrer à la fois cette hausse de près de 2 Mbepj sur un an de la production US et l’impact d’une demande négative sur les tensions commerciales en cours.

 

Christophe Journet

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Mis à jour (Lundi, 03 Décembre 2018 09:57)