BRUXELLES (MPE-Média) – La Commission européenne a conclu au début 2022 avec près d’un mois de retard que l’énergie nucléaire et le gaz pourraient entrer dans la « taxonomie verte » de l’Union moyennant certaines réserves et conditions. Mais rien n’est encore tout à fait finalisé en ce début de présidence française du Conseil de l’UE.

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La précédente version du texte excluait totalement le soutien de la finance verte européenne au nucléaire et aux fossiles dont le gaz (Source CE)

 

Oui, la Commission européenne vient de reconnaître officiellement en ce début de janvier 2022 qu’elle ne doit pas exclure le nucléaire ou le gaz naturel dans sa future taxonomie verte, comme elle le faisait dans une première version de celle-ci, dans la foulée de la sortie du nucléaire de l’Allemagne, malgré un nombre croissant de pays membres souhaitant que ces énergies soient reconnues au titre de la lutte pour le climat et la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Mais non, ce n’est pas encore fini : Les pays membres doivent à présent examiner les dernières propositons de Bruxelles, s’entendre sur une définition de ce qui est «vert » et de ce qui ne l’est pas, en particulier sur le plan des financements et des mécanismes de soutien financier aux différentes sources d’énergies, qualifiées de renouvelables ou non.

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Le tableau comparant les taxonomies vertes définies par les banques globales (Source CE)

 

Soit plus de quatre-vingt pages indigestes rendues publiques, pour tenter de définir ce qui peut être considéré comme « vert », côté finance comme côté ressources d’énergies, ce qui est admissible au titre du « green deal » européen, pour finir par conclure que « la définition de ce qui est vert doit aller au-delà de la notion de taxonomie » en page 59 de ce rapport. Et finalement, en page 80, on trouve la question suivante : « Besoin et approches pour identifier ce qui est vert », mais surtout « quels objectifs politiques devraient entrer dans la définition de ce qui est vert pour la finance verte en Europe » ?

 

Formules hyper sophistiquées, frôlant l’absurde

On découvre de nouveau des formules d’une extrême sophistication, frôlant l’absurde, du type de celle qui suit : « Une taxonomie universelle des secteurs verts qui ne fait pas la différence entre les investissements « vert foncé » et « vert clair » peut augmenter la cohérence du finance- ment vert entre les pays et les régions du monde, mais n'incite pas nécessairement à s'orienter vers les nuances plus sombres et peut avoir des effets de verrouillage. Une taxonomie spécifique à l'UE, quant à elle, pourrait être perçue comme trop ambitieuse par de nombreux investisseurs, ainsi que trop coûteuse à mettre en œuvre. » Kafka n’est pas mort.

 

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Le détail final du questionnaire devant permettre de définir ce qui est vert en Europe (Source CE)

 

La fin du rapport : Il faut débattre à propos des secteurs exclus

 

Où est le problème, pourrait-on dire ? Les fonctionnaires européens estiment que « finalement, plusieurs secteurs font l’objet de controverses », dont le nucléaire, le charbon et le gaz même propres, les biocarburants. Et ces débats doivent avoir lieu au plus haut niveau des pays membres et du conseil européen.

La précédente version de cette taxonomie précisait que faisaient l’objet d’exclusion stricte aux droits à des aides et financements « verts » les compagnies dont les activités se trouvent dans l’exploration-production-exploitation de carburants fossiles ; le secteur nucléaire entier de l’extraction d’uranium, son raffinage, sa conversion, son enrichissement, la fabrication de structures dédiées, l’usage de réacteurs nucléaires, le traitement de carburants fissiles utilisés, la gestion des déchets nucléaires.

Faisaient l’objet d’une exclusion partielle les sociétés oeuvrant pour la logistique des secteurs cités, celles pratiquant du stockage et de l’enfouissement sans capture des gaz à effets de serre, l’incinération sans valorisation énergétique, l’efficacité énergétique pour des énergies non renouvelables ou liée à des activités du secteur des énergies fossiles. Certains fonds peuvent être labellisés verts même si moins de 100% de leurs moyens sont au service d’objectifs verts, comme les actions non listées investies dans des sociétés soutenant la transition énergétique et écologique en accord avec la classification pour au moins 50% de leur valeur. Etc. etc.

 

"Le financement d’investissements qui procurent des bénéfices environnementaux"

Le groupe d’étude finance verte du G20 explique que la finance verte peut être comprise comme « le financement d’investissements qui procurent des bénéfices environnementaux dans le contexte plus large du développement durable. Bénéfices qui incluent par exemple, la réduction de la pollution de l’air, de l’eau et des terres, celle des émissions de gaz à effet de serre, l’efficacité énergétique prouvée dans l’utiisation de ressources naturelles, aussi bien que l’adaptation et l’impact de ceux-ci en terme de co-bénéfices climatiques. (…) Ce qui suppose aussi une compréhension améliorée et l’évaluation en termes de coût des risques financiers relatifs aux facteurs environnementaux. »

Mon tout sur fond d’un plan stratégique sur dix ans que chaque pays doit construire avec les 26 autres, dans une Europe qui dit aussi « promouvoir les plus hauts standards de sécurité nucléaire chez elle et au-delà. Sujet à propos duquel la ministre française de l'industrie déclarait en décembre au Comité stratégique de la filière nucléaire que la présidence Française du Conseil de l'Europe serait marquée par le souhait de la France de voir reconnaître le nucléaire dans la taxonomie verte de l'Union en tant qu'énergie propice au climat. D'autant que la question de ses déchets et de leur élimination par surrégénération ou par transmutation n'était plus qu'une question de temps et d'argent, nous ont confirmé les dirigeants d'Orano dans le même cadre.

 

Christophe Journet

Rédacteur en chef de MPE-Média

Voir aussi via :

https://ec.europa.eu/environment/enveco/sustainable_finance/pdf/studies/

 

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Réaction d’Equilibre des Energies à la taxonomie verte européenne

 

PARIS (MPE-Média) - Pour Equilibre des Energies, l’inclusion probable du nucléaire dans la taxonomie verte doit conduire à encourager fortement les usages de l’électricité décarbonée.

Selon Brice Lalonde, président d’Equilibre des Energies : « La Commission européenne doit revisiter tous les textes qu’elle a publiés, à la lueur du principe « Emission Reduction First » qui doit constituer l’objectif premier de sa politique Energie-Climat. »

Equilibre des Energies accueille de façon positive la proposition de la Commission européenne formulée le 31 décembre dernier, d’inclure, sous certaines conditions, les activités nucléaires au sein de la « taxonomie verte ». Une telle intégration, si elle est confirmée à l’issue de la procédure de consultation qui vient d’être ouverte, permettra d’accroître le volume d’électricité bas carbone disponible pour la lutte contre le changement climatique et d’atteindre ainsi plus facilement la neutralité carbone visée à horizon 2050.

 

"Une avancée positive pour l’intégration de l’électricité décarbonée"

Un bon équilibre entre énergie nucléaire et énergies renouvelables est de nature à conduire, pour les décennies à venir, à un mix électrique robuste garantissant à l’ensemble des consommateurs potentiels l’accès à une ressource en électricité abondante, décarbonée, stable et compétitive. Une telle orientation est une chance pour le redémarrage de notre industrie et pour la conversion vers des solutions bas-carbone des secteurs du bâtiment et des transports poursuit EDEN.

 

"Mais attention à ne pas développer le paquet Fit for 55 sur des principes contraires"

Toutefois, cette ouverture vers des ressources accrues en électricité décarbonée doit s’accompagner d’une politique symétrique au niveau des usages. Or, dans l’état actuel des choses, Equilibre des Energies relève que trop de directives et règlements proposés par la Commission européenne dans le cadre de l’initiative Fit for 55 contiennent des dispositions qui font obstacle à l’utilisation de l’électricité, dès lors qu’elle est d’origine nucléaire, ajoute EDEN.

Des textes fondamentaux assimilent encore la recherche de l’efficacité énergétique à la réduction des consommations en énergie primaire et ne prennent en considération que l’électricité ou l’hydrogène d’origine renouvelable. Dès lors que le nucléaire se voit admis au sein de la taxonomie verte, il y a lieu de traiter désormais à parité toutes les formes d’électricité bas-carbone, conclut EDEN.

 

Plus d’informations sur : https://www.equilibredesenergies.org


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Mis à jour (Mercredi, 05 Janvier 2022 16:17)